Connaissez-vous vos limites ?

À force de trop tirer sur la corde, certains Freds perdent l’équilibre. Mais comment continuer à être une béquille pour les autres, si on n’arrive soi-même plus à tenir debout ?

« Perte de poids, crise d'angoisse… Tellement de mal à sortir pour aller travailler, je ne sais pas jusqu'où j'irai mais je fatigue », témoigne Annick, une Fred de la communauté. « Je n'ai pas tenu le coup, après 2 ans, c'est moi qui ai craqué ! », raconte Jean-Claude au sujet de sa maman. Manque de sommeil, absence de temps pour soi et stress rythment les journées de beaucoup de Freds. Une situation qui plonge les aidant·es en « pilotage automatique », les empêchant parfois de lever le pied à temps.

Connais-toi toi-même

Avant de commencer à perdre pied, le corps et le mental envoient pourtant des signaux avant-coureurs. Le problème ? Il est parfois difficile de les identifier comme tels lorsqu’on a le nez dans le guidon. Un avis que partage Sylvie, une Fred de la communauté Facebook : « On ne se rend pas toujours compte que l'on est bout du rouleau, c'est pourquoi il est important de connaître ses limites ».

Alors, comment repérer les signaux qui indiquent que vous êtes dans le rouge ? On a posé la question à Bertrand Boudin, notre psychologue spécialisé :

« Le trait classique, c’est en premier lieu des difficultés d’endormissement ou des insomnies à cause de la charge mentale, qui provoquent une grande fatigue. Celle-ci peut aussi entraîner des modifications de l’humeur, comme une irritabilité inhabituelle.

On peut également identifier certains problèmes de santé comme un indicateur, un syndrome d'épuisement pouvant entraîner une baisse des défenses immunitaires. L’aidant·e attrapera plus facilement des virus que d’habitude par exemple. Les tâches liées au fait d’accompagner une personne peuvent également causer des troubles au niveau des muscles, des tendons ou des nerfs, dus à des gestes et postures répétitifs ou inappropriés. Ce sont des signes qu’il faut repérer doublement :  c’est-à-dire à la fois le fait d’avoir ces pépins de santé et aussi le fait de les minimiser.

De manière générale, tout cela peut également s’accompagner de pensées un peu tristes et dépressives. D’un point de vue psy, le signe clé qui traduit un épuisement, c’est quand on a le sentiment de subir les choses et de ne pas avoir d’issue. C’est-à-dire à partir du moment où une personne se dit : “Je suis dans cette situation et en fait je n’y peux rien, il n’y a rien à faire et c’est comme ça”. »

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Est-ce que j’y arrive encore ?

Parfois le mode auto-pilote est si bien enclenché que même en cas de signaux d’alerte, on continue coûte que coûte à mettre un pied devant l’autre en serrant les dents et en se disant que ça va passer. Sauf qu’en fait, cela ne passe pas toujours. Il y a des moments où ce n’est juste plus possible et où la chute risque d’être autrement plus douloureuse : « Dans un avion, en cas de dépressurisation, on vous dit de mettre votre masque d’abord puis de mettre le masque à la personne qui vous accompagne. De la même manière, un·e aidant·e, pour bien accompagner son proche, doit d’abord prendre soin de lui/elle », illustre Bertrand Boudin.

Car à vouloir continuer au-delà du possible, on prend des risques : « Lorsque l’on n’arrive plus à prendre sur soi à cause de l’épuisement et des sautes d’humeur, cela peut amener à toute une série de comportements qui vont s’avérer maltraitants envers son proche. » À cause du sentiment de dépassement, on a tendance à entrer dans un cercle vicieux dans la relation d’aide. On a du mal à se maîtriser, ce qui peut mener à des gestes inconsidérés envers l'autre. C’est d’ailleurs ce qui est arrivé à Sylvie, qui témoigne dans l’épisode de notre podcast sur le répit, à écouter juste ici.

Autre conséquence négative soulignée par Bertrand Boudin : la rupture physique. « Il y a le risque pour l’aidant d’une vraie blessure qui peut entraîner l’arrêt brutal de la relation d’aide, et l’hospitalisation du proche ou son placement dans une maison de retraite. Des situations au détriment de la personne aidée, alors même que l’on a justement l’impression qu’on fait tout pour elle. Il y a donc un vrai intérêt à prendre soin de soi pour prendre soin de l’autre. Pour ça, vous pouvez entraîner ce que l’on appelle votre “auto-empathie”, c’est-à-dire la capacité à savoir faire une pause de temps en temps pour se demander “est-ce que j’y arrive encore ?” ».


Et si ce n’est plus le cas ?

Si vous sentez que votre numéro d’équilibriste devient bancal, commencez par identifier les personnes et les activités qui pourraient constituer une ressource pour vous : votre entourage, un médecin traitant, un psychologue, les services de la mairie, des associations… Cela vous permettra de souffler, de prendre du recul et peut-être d'éviter de tomber dans ces situations d’épuisement. Et comme dit Marie, une Fred de la communauté, « connaître ses limites permet de dire non, et aussi de vrais oui ».

Car en considérant le rôle d’aidant comme un devoir, on s’imagine parfois qu’on n’a pas le droit de se faire aider soi-même. D’autant plus qu’il n’est toujours pas facile de se mettre à nu et de reconnaître qu’on n’y arrive plus et qu’on a besoin d’un coup de main. Avouer ses propres limites nécessite en effet du courage, de la lucidité et de l’humilité. Alors on peut faire preuve d’indulgence avec soi-même et suivre le conseil de Catherine, l’une des Fred de notre communauté : « Attention à vous les Freds ! Vous êtes indispensables, alors prenez le temps de vous sortir "de là" de temps à autre pour continuer à l'être. »

BON À SAVOIR

Pour aller plus loin

Le sujet vous intéresse ? On vous propose de poursuivre la réflexion avec trois ressources bien utiles :  

  • Notre podcast “A quel moment faut-il prendre du répit ?” qui relate l’histoire de Sylvie, qui a aidé sa maman pendant des années, jusqu’au point de rupture.
    Pour l’écouter, vous avez le choix : c’est juste ici en vidéo sous-titrée, par là en version audio ou encore par ici si vous utilisez la plateforme d’écoute Spotify.
  • L’article "Burn-out de l’aidant : comment le reconnaître et le prévenir ?" d’Essentiel Autonomie vous propose des solutions concrètes pour souffler, passer le relais et trouver des solutions de soutien et d’écoute (en bas de page).
  • Pour prendre soin de vous, on vous conseille également d’aller jeter un œil aux articles de notre rubrique “La pause détente. L’idée ? Découvrir plein de pistes pour lâcher prise et vous sentir mieux.

Envie de réagir à cet article ? Les Freds sont à votre écoute sur notre groupe Facebook.

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