Le petit guide pour apaiser les tensions
Quand un·e proche est atteint de la maladie d’Alzheimer, on pense avant tout aux troubles de la mémoire.
Mais il y a aussi les autres troubles cognitifs, dont on parle moins mais qui sont tout aussi difficiles à gérer : les pics d'agressivité par exemple, ou encore l'humeur qui joue à saute-mouton.
Comment surmonter ces effets de la maladie ? On est allé chercher des réponses auprès de Bertrand, psychologue spécialisé.
Le syndrome de la radio
Ça vous est peut-être déjà arrivé. Vous êtes en voiture avec la radio allumée. À un moment donné, vous cherchez une place pour vous garer. C’est votre vue qui est sollicitée, mais vous baissez la musique ou la radio. “C’est un exemple simple de la façon dont les ressources cognitives fonctionnent”, explique Bertrand.
“En cas d’Alzheimer, ces fonctions sont altérées, et trier les informations devient alors plus difficile. Les crises d’agressivité verbale ou physique sont donc très souvent liées à une mise en difficulté, qui rend la compréhension du monde plus compliquée.”
Votre meilleure arme, c'est l'analyse
“C’est lors de ces crises qu’il faut être observateur”, note Bertrand. “Vous qui connaissez bien votre proche, ouvrez les yeux et soyez attentifs” : ces accès de colère arrivent souvent au même moment, par exemple pendant la prise d’un repas ou lors de la toilette.
Est-ce qu’à table, la musique est allumée ? Ou alors est-ce que les mots durs fusent quand la nuit a été courte ? “Analysez la situation aussi précisément que possible pour pouvoir ensuite anticiper ou éviter de prochaines crises”, conseille Bertrand.
Comment réagir sur le moment ?
Si la situation se gâte - des insultes, des coups, des cris, - ou simplement si la tension monte un peu trop, il vaut mieux quitter la pièce une vingtaine de minutes pour calmer les esprits. Tenter une explication ne ferait qu’ajouter à la confusion.
Pour mieux comprendre la réaction de votre proche, “vous pouvez essayer d'adopter un point de vue très extérieur”, conseille Bertrand. “Imaginez-vous la scène suivante : vous vous retrouvez nu, vous ne savez pas où vous êtes, on vous asperge d’eau et on vous touche… Avec un certain degré d’incompréhension, ça peut être comme ça que votre proche vit le moment de la toilette”, observe Bertrand.
Et après ?
On ne le dira jamais assez : il vaut mieux en parler ! En famille quand c’est possible, par exemple dans la fratrie. À sa moitié, son ami·e, ou dans des groupes de parole… La communauté des Freds est aussi là pour ça, notamment au sein du groupe Facebook.
“En parler apporte un vrai soulagement, il ne faut donc pas s'en priver”, confirme Bertrand. Avant d’ajouter : “Mais parfois, ce n’est pas assez. Ça libère, mais évidemment ça ne résout pas la situation. Si on n’arrive plus à gérer seul, des formations existent auprès d’associations.” On pense notamment aux formations de France Alzheimer, qui sont totalement gratuites et prennent place aux quatre coins de la France.
“Et bien sûr, si c’est possible, il faut accepter de déléguer certains gestes. Votre présence est précieuse pour observer les petits détails du quotidien et prendre soin de votre proche, mais paradoxalement cette position d’enfant, de nièce ou de petite soeur peut ajouter au problème en faisant entrer de l’affect dans l’histoire”. S’éloigner permet parfois de limiter les dégâts.
Ce qu'il faut garder à l'esprit
Au cours de nos discussions avec Bertrand, on s'est noté de nombreux conseils pour prendre du recul sur la situation. Ceux-ci nous paraissent particulièrement importants :
- Certains profils sont sujets aux sursauts d’agressivité
Une personne ayant fait preuve d’autorité dans sa carrière ou ayant un fort caractère (voire une tempérament bagarreur) a plutôt tendance à faire preuve d’agressivité en développant la maladie d’Alzheimer.
- Les émotions peuvent être nombreuses
Quand on fait attention à chaque détail, on peut avoir tendance à culpabiliser pour la moindre erreur. Ou lorsqu'un parent autrefois idéalisé devient peu à peu violent, la honte gagne facilement du terrain.
Analyser ces émotions permet de mieux les gérer.
- Attention à la sous-stimulation
On l’a vu, les épisodes agressifs sont souvent liés à une sur-stimulation. Mais la sous-stimulation n’est pas une solution miracle, puisqu’elle participe à la dégradation des capacités cognitives. “Éliminer toutes les stimulations, c’est créer le vide et ça peut être une grande source d’angoisse”, note Bertrand. Il suggère des activités simples, sans enjeux et valorisante pour votre proche. Et une nouvelle fois, c’est vous qui êtes le mieux placé pour savoir ce qui lui plaira.
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